La répression allemande: discrimination et terreur

Publié le par PAtrice Rolli

La répression allemande : discrimination et terreur

 

« La terreur est l’arme la plus puissante, je ne m’en priverai pas ».

                                                                                   

                                                                                                                           Adolf Hitler

 

     

      Au début de l’année 1944, la Dordogne constitue, avec les départements de la Corrèze et de l’Ain, une région à forte implantation de la Résistance. La cité de Mussidan, située sur un axe routier et ferroviaire de toute première importance pour le contrôle de la région, y tient une place toute particulière.  C’est pourquoi les opérations militaires prennent des proportions massives et géographiquement étendues, comprenant le massacre de populations civiles savamment prémédité.

        Ces opérations s’inscrivent dans une stratégie délibérée de terreur ouvertement pratiquée par l’occupant qui mène tout droit aux exactions de Rouffillac le 8 juin 1944, aux pendaisons de Tulle le 9 juin, au massacre d’Oradour le 10, de Mussidan le 11…

 

 

En quelques mois, la région de Mussidan connaît plusieurs opérations de répression. Le 16 janvier 1944, après avoir cerné et occupé la ville, les Allemands arrêtent, d’après une liste établie à l’avance, 36 personnes soupçonnées d’aider le Maquis. 

 

« Le dimanche 16 janvier, un brouillard épais enveloppait la ville. Mon frère est parti chez le coiffeur, il est revenu immédiatement en disant qu’il y avait des Allemands partout, qu’ils gardaient le pont.  Mon frère s’est avancé jusqu’au pont. Juste à ce moment, un homme en civil, assisté de trois soldats en armes, demandait à une femme où habitait exactement Jean Serventie. Cet homme était Willy Erspacher, membre du Sicherheitsdienst et interprète à la Gestapo. La femme désigna mon frère et indiqua qui il était. Le gamin a dû guider les Allemands jusqu’à notre domicile. J’ai pu prendre mes papiers, embrasser ma femme et mon fils puis j’ai été emmené ainsi que mon frère de quinze ans […]. J’ai retrouvé dans ces locaux [la Gestapo de Limoges] Jeannot Laurière qui avait été arrêté le jour même, au volant d’une camionnette transportant des armes. Je ne l’ai pas reconnu de prime abord, tellement il  avait été battu. Il m’a regardé et a haussé les épaules […]. Nous avions été dénoncés, il connaissaient notre rôle dans la Résistance. J’ai de fortes présomptions sur l’homme qui m’a livré. »

 
      Témoignage de Jean Serventie (Bordes-Basso de March;  2000: 72-77)

 

Jean Laurière est fusillé le 8 mars 1944. Les autres sont déportés dans des camps de concentration en Allemagne. Quinze d’entre eux ne reviendront pas. Certains opposants, tels les frère Arnault et Robert Crouzille, entrent dans l’illégalité et fondent leur propre groupe armé.

En mars 1944, une division allemande, spécialement formée à la lutte contre les « terroristes » et  qui, jusque là, stationnait dans la région parisienne, est envoyée en Périgord dans la perspective d’y semer la terreur parmi la population et de procéder à l’arrestation de tous les Juifs. Du 26 mars au 2 avril, la division Brehmer multiplie les exactions, assassinats et pillages et fait en Dordogne des centaines de victimes civiles (fusillées et déportées).

 Le 26 mars, parallèlement à une action de représailles menée à Brantôme, c’est la forêt de la Double qui est investie. Des rafles importantes sont opérées à Saint-André-de-Double, Beauronne, Saint-Front-de-Pradoux. Les Allemands ratissent la forêt et, usant de grenades et de divers projectiles incendiaires, allument méthodiquement de gigantesques incendies dont la propagation est favorisée, à cette époque, par la sécheresse des sous-bois. Les fumées qui s'élèvent alors de la Double couvrent le soleil tant l’incendie est virulent. Mais les maquisards, avertis à temps, ont quitté la région la veille. Georges Weil, un jeune juif de 23 ans réfugié de Strasbourg, est arrêté, emmené, puis sauvagement assassiné au lieu-dit « Daubies », à Saint-Médard-de-Mussidan.

 

« Ce 26 mars 1944, le jeune Georges Weil, âgé de 23 ans se trouvait avec sa mère au 29, rue de Bordeaux. Réfugié juif strasbourgeois, ils vivaient à Mussidan depuis septembre 1939. Ils n’étaient pas repartis en 1940, conscients des risques qu’ils couraient en Alsace de par leur religion. Ils se sentaient en relative sécurité dans la cité […]. Les Allemands sont venus le chercher. Les brutes nazies ont emmené le jeune homme sur la route de Sainte Foy aux Daubies, et l’ont exécuté sauvagement. Son corps était littéralement criblé de balles. »

 

Témoignage de Madame Bordas (Bordes-Basso de March; 2000 : 72-77)

 

Au total, le bilan humain de l’action de la division Brehmer au soir du 26 mars est particulièrement éloquant puisqu’il s’établit à 52 victimes auxquelles il faut ajouter plus de 350 personnes embarquées dans un train, conduites à Périgueux et parquées dans une humiliante promiscuité au Manège d’artillerie. La plus grande partie des « raflés » peut regagner son domicile après plusieurs jours d’interrogatoires. Une centaine de personnes, cependant, prend le chemin du travail forcé en Allemagne ou des camps de concentration.

Enfin le 12 avril, 45 ouvriers de l’usine « Bois et Fer » de Saint-Médard-de-Mussidan sont arrêtés et envoyés au S.T.O. en Allemagne, à Bègles ou à Saint-Astier.

 

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